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L'utilisation excessive des plastiques constitue un exemple frappant de la manière dont les matériaux peuvent devenir une source majeure de pollution. La sobriété matérielle, qui consiste à limiter la consommation de matériaux, constitue donc un levier majeur pour diminuer l'impact de nos sociétés sur l'environnement. Bien qu'il semble désormais utopique de se passer des plastiques, l'espoir réside néanmoins dans le fait qu'une grande partie d'entre eux, dits thermoplastiques, ont la faculté de se déformer ou de s'écouler lorsqu'ils sont chauffés.
Cette propriété permet de les remodeler, offrant ainsi la possibilité de les réparer et de les réutiliser directement, ce qui présente une alternative moins coûteuse qu'un recyclage chimique. Parmi les diverses méthodes qui existent pour chauffer et réparer les plastiques, le chauffage par induction magnétique constitue un moyen rapide et efficace d'échauffer localement la matière. Cette technique, notamment utilisée comme traitement contre certains cancers, peut être également employée pour réparer les plastiques permettant ainsi d'accroître leur temps de vie.
Si la raison principale de leur manque d'applicabilité est parfois à chercher au niveau de leur prix et de leur complexité chimique, une autre raison plus fondamentale réside dans l'incompatibilité entre capacité à s'autoréparer et rigidité élevée - la première nécessitant une grande mobilité moléculaire et la seconde de fortes liaisons entre les constituants de la matière. En outre, l'industrie du plastique et ses procédés de fabrication étant arrivés à maturation, c'est tout un écosystème qu'il faut repenser pour inclure la production d'une part significative de matériaux innovants.
Dans le dernier cas, l'opération consiste à intégrer dans le matériau plastique une faible quantité de particules magnétiques (1 à 5 % de son volume). Ces particules sont en effet capables de transformer le stimulus magnétique oscillant en chaleur au sein même de la matière, grâce à un phénomène appelé hyperthermie magnétique. Pour atteindre des températures de l'ordre de 150-200 °C, il est commun d'utiliser des champs magnétiques ayant une intensité de quelques milliteslas (l'équivalent d'un aimant de réfrigérateur) et une fréquence d'environ 500 kHz (contre 20 à 100 kHz pour une plaque induction standard).
Cette technologie a l'avantage de pouvoir être utilisée sur des matériaux dotés de propriétés mécaniques très différentes, ce qui permet de l'appliquer sur une large gamme de plastiques. En effet, elle a récemment été employée pour traiter des matériaux de grande consommation tels que le polypropylène (utilisé pour faire des pare-chocs de voiture) ou certains polyuréthanes souples (employés comme gaine d'isolation électrique).
Un autre avantage que présente cette technique est de pouvoir lisser une pièce rugueuse pour effacer ses défauts en surface. Cela est particulièrement utile pour des pièces imprimées en 3D dont la rugosité diminue sensiblement les performances mécaniques et rend l'aspect peu attractif.
Cette technique offre la possibilité de chauffer sans contact ni besoin de faire parvenir la lumière, et fonctionne donc dans des matériaux opaques. Elle offre un grand contrôle, étant donné que la quantité de chaleur dégagée peut être contrôlée par les caractéristiques du champ magnétique, mais aussi par la quantité et la nature des particules stimulables. La localisation des particules permet également de chauffer sélectivement une zone désirée.
Dans le cas de matériaux composites basés sur des plastiques, ces avantages sont tout aussi utiles et posent de nouvelles questions scientifiques à résoudre afin d'améliorer le procédé de réparation.
D'autres aspects concernent davantage les physiciens, par exemple les questions liées aux mouvements des particules soumises au champ magnétique. D'une part, les particules ont tendance à se regrouper et à s'organiser en formant des chaînes, ce qui soulève des interrogations sur la réversibilité et l'utilisation répétée de cette technique. Sous l'effet du champ magnétique, les particules se mettent aussi à tourner sur elle-même, ce qui engendre un dégagement de chaleur supplémentaire par friction, dépendant du milieu environnant. Il est nécessaire de quantifier cet effet pour ne pas surchauffer les pièces, ce qui entraînerait leur dégradation.
L'aspect noir des matériaux (lié aux particules magnétiques) rend aussi plus difficile leur utilisation comme pièces visibles, notamment dans l'industrie automobile où la cicatrisation de rayures superficielles sur des pièces colorées représente un réel intérêt commercial. Mais il est aussi possible de réparer en moins d'une minute des caoutchoucs, typiquement des semelles de chaussures ou des joints d'étanchéité, ou même des plastiques durs présents dans des articles de voyage, de sport, ou dans des packagings rigides en tout genre. Finalement, la diffusion des technologies liées à l'hyperthermie magnétique nécessitera l'appui d'industries innovantes, capables d'identifier des applications de niche pour passer de concepts généraux à des produits de haute valeur ajoutée.
Auteurs: Guilhem P Baeza, Laura Ea, Mathieu Salse, Simon Fritz
Source: The Conversation sous licence Creative Commons